Saturday, September 30, 2006

Mi porro me sabe a caña, me sabe a toros, me sabe a fiesta, me sabe a ron (Toto la Momposina - Los Sabores del Porro)

Samedi matin, ou plutôt samedi à l'aube: retour à Cartagena. Mon cousin a eu un appel la veille pour un entretien l'après-midi même, et il a réussi à négocier un rendez-vous le samedi à 9h30. Ca nous fait partir de Sincelejo à ... 4h30!!!
A cette heure là il n'y a pas encore de départs de cars, mais il y a déjà des voyageurs. Et comme en Colombie les entrepreneurs ont du flair, il y a donc une flotte de taxis collectifs postée devant les bureaux encore fermés de la compagnie de cars. On négocie le trajet à 30 000$ par personne et le taxi nous déposera devant la porte de chez mon oncle (25 000$ pour le Terminal de bus, mais on est pressés). 15 minutes plus tard on part récupérer les autres passagers qui ont réservé la veille: un couple et leurs 3 enfants, puis deux autres voyageurs. Les taxis longue distance sont par contre des monospaces, et tout le monde a son siège et s'attache. 5h30: départ de Sincelejo.
On ne revient pas par la Troncal de Occidente mais par la Transversal del Caribe, parce que le chauffeur doit déposer un des voyageurs dans un des village qu'elle traverse. La Transversal del Caribe est plus proche de la Côte et c'est l'équivalent d'une départementale. Elle ne traverse pas beaucoup de villages, mais des champs à perte de vue. De Sincelejo à San Onofre, ce sont des champs de maïs; ensuite des cultures de tabac. En passant dans le département de Bolivar à la hauteur de Maria la Baja (le village où ont grandi mon père et ses frères et soeurs), ce sont des plantations de palme. Puis les hameaux se resserrent jusqu'à ce que la Transversal del Caribe rejoigne la Troncal de Occidente près de Malagana.
Il est 7h, le jour est complètement levé et le soleil commence déjà à chauffer. Heureusement, le taxi a la clim'. La route est droite mais la conduite est sinueuse, et ça ne loupe pas: un des enfants rejette son petit-déjeuner, le pauvre... Les taxis collectifs et les camions sont les seuls véhicules, ce qui ne les empêche pas de jouer les rois du bitume entre eux. Et ce n'est pas forcément à l'avantage des taxis: alors que notre chauffeur commence à déboîter pour doubler, un camion arrive de l'arrière à fond la caisse sur la voie de gauche! Devant nous: deux camions donc impossible pour l'as du volant de se rabattre devant nous. En face: un taxi collectif suivi de deux camions. En quelques secondes le taxi d'en face se jette sur le bas côté et tous les autres véhicules freinent à mort. Par je ne sais quel miracle le bolide de 30 tonnes se faufile sans encombre! Tout le monde reprend son souffle et sa route...
Après Malagana les camions de la Troncal et de la Transversal se rejoignent avant le pont, et les bouchons commencent... Les vendeurs le long de la route en profitent pour assaillir les véhicules. C'est long, c'est long, mon cousin regarde sa montre toutes les deux minutes... Ouf! On a enfin passé le canal del Dique. Il est 8h et la circulation reprend. Arjona, Turbaco, Cartagena!
Arrivée à 8h30 chez mon oncle. Mon cousin vole hors du taxi, se douche, s'habille, déjeune et hop! A 9h il est parti pour son entretien. Tellement vite que Tio Guillo et Nati sont paniqués! Ils n'ont pas eu le temps de lui donner leur bénédiction... Quant à moi ça fait ni une ni deux: j'ai gardé les yeux grands ouverts pendant tout le trajet pour admirer le paysage, mais faut pas pousser: je vais finir ma nuit!!

Friday, September 29, 2006

An ti réyon a solèy asi figi an mwen, ka fè mwen sav kè sé lè a révèy (Admiral T - Rev an Mwen)

Vendredi: première pluie depuis que je suis arrivée sur la Côte.

Si à Bogota c'était "l'été", sur la Côte c'est censé être "l'hiver", c'est-à-dire la saison des pluies. Dans la Caraïbe c'est même l'époque des cyclones, mais la Sierre Nevada de Santa Marta et ses pics de plus de 5000m, au nord-est de Cartagena, protège naturellement la ville. Or pendant mon séjour il n'y a eu que quelques gouttes de pluie à Cartagena et une petite averse à Sincelejo. Le reste du temps il a fait une chaleur à crever et un cagnard pas possible, puisqu'aucune pluie tropicale ne passait par là pour rafraîchir l'atmosphère. Ce qui est très inhabituel à cette période de l'année.

C'est à cause d'El Niño... le retour! Ce phénomène météorologique revient tous les 4 à 6 ans. En Colombie, il se traduit par la sécheresse sur la Côte et le déluge dans l'intérieur du pays, jusqu'au mois de mars à peu près. Apparemment cette année il ne devrait pas être trop fort donc les économistes ne sont pas inquiets: les pertes agricoles seront compensées par la hausse du tourisme - le touriste étant une espèce particulièrement attirée par les climats chauds et secs ;-) .

Mais pas une goutte d'eau en pleine saison des pluies, c'est quand même très perturbant! Même si à Cartagena ce qui est difficile à supporter ce n'est pas la chaleur (il n'a pas fait plus de 32°C, contre 38°C à Paris en juillet dernier), c'est le taux d'humidité: entre 80% et 85% toute l'année! Et dans ces conditions... impossible de discipliner ma chevelure!! Le brushing soigneux de ma tante Rosa tient 2h, et au jour le jour c'est carrément la crinière... D'où mon surnom dans la famille: "Cabeza de leon"... sympa...

Thursday, September 28, 2006

Quiero entregarte el amor de mi Sabana, y dedicarte esta cancion vallenata (Peter Manjarres - El amor de mi Sabana)

Jeudi matin: départ de Cartagena, capitale du département de Bolivar, en route pour Sincelejo, capitale du département de Sucre (rien à voir avec la canne ou la betterave: de Antonio José de Sucre, maréchal de Simon Bolivar).
En sortant de Cartagena, on traverse Turbaco et Arjona. Puis, entre Gambote et Sincerin (ville de l'équipe où joue le fiancé de Cori), on traverse le Canal del Dique, qui traverse tout le département de Bolivar pour relier le fleuve Magdalena à la mer. Ensuite on arrive vraiment dans l'arrière-pays, en passant par San Juan Nepomuceno (où est née ma grand-mère)... San Jacinto (le village des artisans, spécialisé dans le tissages des hamacs)... puis arrêt au Carmen de Bolivar. Des vendeurs montent dans le bus pour proposer encas et boissons aux voyageurs...
Le Carmen de Bolivar est traversée par la Troncal de Occidente (qui longe les départements côtiers), et la Troncal del Magdalena (qui la relie à Valledupar, au nord-est de la Colombie) ainsi que par l'oléoduc Caño Limon - Coveñas (qui transporte le pétrole du 2e plus grand gisement colombien, du département d'Arauca à la frontière vénézuelienne jusqu'à la mer des Caraïbes pour l'exportation). Elle est aussi sur le passage d'un couloir naturel de l'intérieur du pays vers la mer. C'est donc une petite ville hautement stratégique pour la guerrilla comme pour les paramilitaires, devenue malgré elle l'épicentre de la violence dans la région. C'est pourquoi il faut partir tôt quand on va de Cartagena à Sincelejo, pour passer le Carmen de Bolivar avant la nuit. De 2002 jusqu'à il y a un mois, la Troncal de Occidente était même fermée à la circulation la nuit. Elle vient de rouvrir 24h/24, mais sous haute protection de l'armée la nuit.
Après le Carmen de Bolivar, on entre dans le département de Sucre. On traverse Ovejas, puis on arrive enfin sur Sincelejo, après 3h de route. Sincelejo est une petite ville provinciale de 250 000 habitants. Au centre d'une région d'élevage - la Sabana del Caribe - la ville est connue pour sa fête taurine en janvier. Les maisons ont bien l'eau courante, mais elle n'arrive que tous les 3 jours. Pour la cuisine, les toilettes, le bain etc... il faut donc remonter des seaux d'eau depuis le réservoir de la cour. Ici, c'est le règne des motos et des mototaxis: pour trouver un "vrai" taxi il faut vraiment être patient! L'avantage, comme dit ma cousine Sandra, c'est que Sincelejo est tellement petit que tout est près!! Vu comme ça...

Wednesday, September 27, 2006

Que quiere la chica, varon? Que le ponga el cinturon! (Original del Manzanillo - El cinturon del taxi)

A Cartagena, se déplacer est à la fois plus facile et plus difficile qu'à Bogota. Bien que la ville soit beaucoup plus petite, l'orientation est un cauchemar. Cartagena est au départ une ville coloniale, donc dans le centre-ville les rues ont des noms et pas des numéros comme à Bogota. En dehors du centre-ville, c'est soit des numéros, soit des noms, et jamais aucun panneau pour s'orienter! Pour se déplacer quand on ne connaît pas, c'est un peu la galère...

Busetas: les busetas de Cartagena ne sont plus ce qu'elles étaient. Finis les bus à la suspension digne du Paris-Dakar, décorés de pompons de toutes les couleurs, tapissés de dictons populaires et de bénédictions et avec le vallenato à fond la caisse. Il en reste quelques uns sur certaines lignes, mais l'essentiel des bus sont modernes (et j'ose espérer moins polluants), avec compteur des passagers par capteur infra-rouge et sièges moins tape-fesses. Ce qu'il y a de bien à Cartagena c'est que tous les chemins mènent à Rome, puisque toutes les lignes de busetas passent par le centre-ville! C'est pour le retour que ça se complique...

Taxis: à Cartagena, par sécurité ou parce que les noms des rues ne sont jamais indiqués, quand tu rentres dans un taxi c'est à toi d'indiquer au chauffeur par où passer! Conclusion: quand on ne connaît pas la ville... on ne prend pas le taxi! C'est bien la première fois que je vois ça! Il n'y a pas de compteur non plus, donc il faut négocier le tarif AVANT de monter dans le taxi, et là encore si tu ne connais pas c'est mal barré... L'avantage du taxi: si on est patient on en trouve des climatisés et on accorde ainsi 15 minutes de répit à nos glandes sudoripares... Et aussi: les taxistes ne sont pas regardants sur le nombre de passagers. Vous croyiez qu'une banale berline ne pouvait prendre que 5 passagers EN TOUT?? Erreur! Un soir on est montés à 6 passagers en plus du chauffeur: 2 mecs sur le siège passager et 3 filles + 1 autre gars à l'arrière!!! Il va sans dire que de toutes façons, les ceintures de sécurité sont bloquées et il est donc impossible de s'attacher dans aucun taxi colombien même quand on est le seul passager...

TransCaribe: c'est l'équivalent du TransMilenio de Bogota: un système de transport massif par bus en voies réservées. Il est en travaux et du coup le centre-ville de Cartagena est sens dessus-dessous. Le système d'égouts du centre-ville a dû être refait pour pouvoir poser les voies et des études ont été menées pour savoir si les travaux menaçaient les murailles, vieilles de 5 siècles et patrimoine de l'Humanité. Du coup, le TransCaribe n'entrera en service que dans 1 an ou 2. Les bus seront-ils climatisés? That is the question...

Mototaxis et cyclotaxis: ça c'est la différence avec la capitale. Vu le climat et aussi parce que Cartagena est une ville où la majorité des habitants sont pauvres, les motos sont partout. Pas les mégabolides, non: les petites japonaises qui résistent à tout. Ici c'est le royaume de Suzuki, Honda, Kawasaki... On reconnaît les mototaxistes parce qu'ils ont un second casque à la main. Et aussi, il faut le dire, parce que ce sont pratiquement les seuls motards de Cartagena à porter le gilet fluo avec l'immatriculation du deux-roues, pourtant obligatoire!!! D'ailleurs, la moitié des motards de Cartagena ne portent pas de casque, et là encore le nombre de passagers est flexible. Expérience personnelle: à 3 sur une petite moto, le conducteur lisant un texto sur son portable tout en filant à travers la circulation... Si on n'est vraiment pas pressés on peut aussi prendre le cyclotaxi, l'équivalent du rickshaw indien, et on s'épargne la crise cardiaque...

Eh oui, j'insiste encore sur les transports, mais c'est que monter dans un transport public ou traverser la rue en Colombie est une expérience culturelle à part entière, et surtout un risque majeur et bien plus fréquent que l'enlèvement par la guerrilla!!

Tuesday, September 26, 2006

Vamos pa la playa, a pasarla bien con los friends! (Kafu Banton - Vamos pa la playa)

Mardi après-midi: farniente sur la terrasse avec les trois Mousquetaires, mes cousin et cousines (dans l'ordre) Cori, Meli et Yei, avant le départ pour la plage

Cori vient d'avoir 27 ans. C'est la benjamine dans sa famille. Elle a fait des études d'anglais et cherche du boulot mais à Cartagena malgré l'industrie du tourisme, il y a peu d'opportunités. Elle espère pouvoir se marier à la fin de l'année si les moyens le permettent. Son copain travaille tout en terminant ses études, et est en plus joueur professionnel de base-ball et membre de la sélection nationale colombienne de base-ball. Le base-ball est un sport très populaire sur toute la côte caraïbe de la Colombie, comme dans toute la Caraïbe d'ailleurs (mais est pratiquement inexistant à l'intérieur du pays!). Cori passe donc religieusement ses dimanches après-midi et quelques soirées de la semaine à griller dans un stade pendant au moins 3h. C'est beau l'amour!

Meli a bientôt 22 ans et c'est l'ainée dans sa famille. Meli, c'est la tornade, la grande gueule, la fêtarde, la fofolle de la famille. Avec elle, impossible de s'ennuyer! Meli a commencé des études à l'université mais ça ne lui a pas plu donc elle a arrêté. Elle vient de commencer une formation professionnelle dans l'évènementiel, ce qui est judicieux à Cartagena, première ville de congrès et de conventions en Colombie. Elle compte aussi se marier, courant 2007, avec son copain qui est videur dans une boîte de Cartagena.

Yei a bientôt 28 ans et est enfant unique (le seul de notre pléthorique famille!!). Il est informaticien... et cherche job désespérément lui aussi. Footballeur amateur et prof d'aérobic quelques heures par semaine le temps de trouver un VRAI travail... et toujours célibataire bien que pas mal courtisé, et ce malgré les pressions de la famille ("Alors l'héritier c'est pour quand? Et le mariage, il faudrait y penser!" etc...). Mais il gère...

Sans oublier Daniela qui espionne les grands cousins par la fenêtre, hehehe...

Premier et dernier jour de plage de mon séjour, d'ailleurs... Eh oui, comme tous les gens qui vivent au bord de l'eau, ce n'est pas pour autant qu'ils y passent des journées à griller! Ici, on va à la plage le samedi en famille, et en semaine c'est pour les touristes.. comme moi! Mes cousins me font donc une concession pour m'accompagner en plein mardi après-midi. Quant à aller se baigner... pas question! Ca, c'est vraiment QUE pour les touristes! Bon, je me baignerai donc toute seule et tant pis si un requin s'approche...

Monday, September 25, 2006

Feel the love generation (Bob Sinclar - Love Generation)

Lundi matin, j'émerge de ma troisième nuit de rumba. Cartagena est la ville où toute la Colombie vient faire la fête, alors il faut bien en profiter!

Petit aparté: En 1995, Antanas Mockus, maire de Bogota, a imposé la "Ley Zanahoria". "Zanahoria" est un mot d'argot qui désigne, en gros, celui qui tue l'ambiance parce qu'il ne boit pas. Le décret obligeait les boîtes de nuit et autres lieux de vente d'alcool à fermer à 1h du matin, afin de réduire les accidents et les morts liés à l'alcool. Depuis les conditions ont été progressivement assouplies à Bogota, d'autant que de nombreuses boîtes se sont transformées en clubs privés pour contourner le décret. Mais l'idée a été reprise par de nombreuses villes colombiennes... sauf Cartagena! Donc en plus de fantasmer sur la ville coloniale au bord de la mer des Caraïbes, les jeunes de l'intérieur du pays fantasment depuis sur ses boîtes ouvertes jusqu'au bout de la nuit... Alors en résumé du week-end:

Vendredi soir: Green Moon, derrière le Paseo de la Castellana dans les faubourgs de Cartagena.
Le public est plutôt jeune et du quartier. Pendant la première moitié de la soirée la musique est variée: salsa, reggaeton, vallenato, champeta, électronique... tout ce qui s'écoute à Cartagena. Le Ron Medellin tourne et tourne et tourne... Vers 2h a débarqué un groupe de reggae de San Andres pour chanter quelques chansons en live. Ensuite ça a été ambiance reggae/ragga tout le reste de la soirée, pour le plus grand plaisir de la vingtaine de jeunes de San Andres. Les Cartageneros, par contre, ont commencé à s'ennuyer profondément... Pas assez latino pour eux! Une bonne soirée quand même.

Samedi soir: Joy Slava, nichée contre la muraille dans le centre historique de Cartagena.
C'est une des boîtes les plus chics de Cartagena, avec Tu Candela, Mister Babilla et le Café del Mar. L'entrée vaut 10 000 pesos (3,3€) et ne donne droit à aucune consommation, ce qui est extrêmement cher et sélectif pour la Colombie. Mais... on n'a rien payé vu qu'on est rentrés avec un pote de ma cousine Meliza qui est un habitué de la boîte.

A l'intérieur de la boîte: trois salles pour trois ambiances. Une salle qui passe plutôt du rock et de l'alternatif, une salle spécialisée musique électronique et une salle qui passe de tout mais en majorité de la musique latina. On a préféré cette dernière salle vu qu'elle passait de tout. Mais même après 1h ou 2h du matin la salle s'est à peine remplie. Bizarre que la boîte reste à moitié vide un samedi soir... On décide donc de faire un tour et là on découvre que la salle électronique est remplie à ras bord!!!!

En fait, le public de ce genre de boîte, c'est en gros: la jeunesse dorée colombienne, les touristes ou hommes d'affaires européens et américains, les mannequins et starlettes venues faire des shootings sur les plages de Cartagena, et tout les parasites qui vont avec... C'est-à-dire un public qui n'a pas grand chose à faire de la musique qui passe à la radio, bien trop populaire, et qui préfère se croire à Ibiza qu'à Cartagena... enfin, sauf pour la disponibilité de la poudre blanche... La moitié de l'assistance a l'air bien partie sur ce chemin, l'autre bien imbibée à l'alcool d'importation (bien plus chic que le Ron Medellin). L'ensemble semble sorti de la revue Jet-Set -voire de la série Sin tetas no hay paraiso, et pour vous en convaincre, allez voir les photos de la soirée sur Pegateya.com, le site des soirées branchées de Cartagena... Bon, évidemment, on ne nous a pas proposé d'être sur le site. Et quelque part c'est assez amusant d'être regardée de haut parce que pas assez bien habillée et les cheveux trop frisés, alors que je viens justement de cette culture occidentale qu'ils cherchent tous à copier (très mal!)... Une soirée pleine d'ironie...

Dimanche soir: Lagartija tija tija, dans les quartiers de Cartagena.
A 23h la boîte est pleine à craquer, et pourtant c'est le Jour du Seigneur... Il va falloir se lever pour aller travailler demain? Pas de problème, on partira juste un peu plus tôt que d'habitude! A peu près le même public, la même musique et la même bonne ambiance qu'au Green Moon. Là, l'entrée vaut 10 000 pesos "convertibles" en boisson au bar. Mais on n'a pas payé non plus vu que le gérant est un ami de mon cousin, hehehe... A minuit-1h, arrivée du groupe de reggaeton Sin Fin:

Au total, j'ai jamais bu autant d'alcool de ma vie, ce qui pour moi signifie: 2-3 shoots de rhum le vendredi, un Cuba Libre le samedi -définitivement plus libre que cubain- et la moitié d'un autre le dimanche. Pas vraiment zanahoria mais presque!!

Sunday, September 24, 2006

Anytime you see me come around, don't take bad man fi clown (Beenie Man - Bossman)

Dimanche matin, je rentre de boîte à 4h30, mon cousin Jinner se lève 1h après. C'est jour de défilé au lycée militaire. Hier il a loué l'uniforme d'apparat. La veste est trop grande et la casquette trop petite mais on fera avec. Il manquait aussi quelques boutons mais il a pu s'en procurer et sa maman Maria a cousu, lavé et repassé à la dernière minute. C'est pas le cas de tous ses copains: un autre élève n'a pas trouvé les fameux boutons officiels et a cousu deux boutons du Real Madrid à la place! De loin, ça se voit pas...


Mon cousin est un peu déçu car finalement il ne défilera pas; il sera de garde, immobile sous le cagnard. La famille renonce donc à se déplacer: ce sera pour quand il défilera vraiment.

De retour à la maison, le petit frère n'en croit pas ses yeux de voir l'ainé en uniforme, et il ne le quitte pas d'une semelle. L'occasion de prendre quelques jolies photos...






Saturday, September 23, 2006

Who's that lady? Beautiful lady, lovely lady, real fine lady (The Isley Brothers - Who's that lady)

Samedi, c'était la première communion de ma cousine Daniela. Après l'Eglise... la fête! Et ici on met les petits plats dans les grands: une trentaine d'enfants invités, hot-dogs et soda pour tous et musique à fond la caisse histoire que tout le quartier partage!

Je suis donc devenue photographe officielle de la soirée. Préparatifs des photos souvenirs: Daniela rajuste son diadème, ma tante Sady l'aide à enfiler ses gants, Meliza apporte son bouquet de fleurs à la dernière minute...


Tout le monde est prêt? C'est parti! Mademoiselle avec ses invitéES:

Puis avec ses invitéS:

Pendant qu'à la cuisine, la voisine, le cousin Jair et Tia Sady s'activent pour faire les hot-dogs pour la marmaille... les parents de la princesse rentrent du travail (Tia Rosa au milieu en bleu, et le papa).

Les petits ventres remplis, on peut enfin danser jusqu'au bout de la nuit!


Enfin... jusqu'à 20h, quoi. C'est pas tout ça mais nous les grands on doit nettoyer et se préparer pour sortir. C'est samedi soir quand même! Ouste! Dehors tout le monde!

Friday, September 22, 2006

Cuando tendremos la democracia? Cuando tumbemos la burocracia. Cuanto desearia yo menos demencia y mas amor! (Mana - Justicia, tierra y libertad)

Dans la nuit de vendredi à samedi, une liste est apparue au coin de la rue de mon oncle Gilberto, où je suis hébergée. A 7h et quelques elle avait été arrachée, mais tout le quartier était déjà au courant.

Il ne s'agit pas de n'importe quelle liste. Une liste qui comportait 6 ou 7 noms et prénoms dans un ordre précis. Une liste noire.

Les gens nommés sont des délinquants notoires résidant dans le quartier, auteurs de braquages, cambriolages, violences contre les habitants. La liste indique à tous les habitants que le quartier sera bientôt "nettoyé" de ces personnes. C'est-à-dire qu'un jour ils disparaîtront et on ne les retrouvera pas, en tous cas pas vivants.

Un voisin tente de dire que l'une des personnes nommées est "propre". Bien sûr on ne sait pas qui a affiché la liste (ou, à mon avis, on préfère prétendre ne pas les connaître, car dans les quartiers tout se sait, tout se voit et tout le monde connaît tout le monde). Mais à l'intérieur des maisons, on ne parle pas trop et on se réconforte en se disant qu'on mène une existence honnête et qu'on n'aura a priori jamais affaire à ces gens-là. A midi, la liste est devenue un non-évènement et on prépare assiduemment la rumba du samedi soir...

Voilà très concrètement comment fonctionne la "Justice" dans un pays qui n'est toujours pas un Etat de droit. Face à un système judiciaire lent, inefficace et corrompu, la triste réalité est que les gens finissent par faire justice eux-mêmes. Ou plutôt, que des groupes bien particuliers jugent être dans une impunité suffisante pour se substituer à la Justice sous prétexte de protéger les honnêtes gens. C'est l'histoire de l'oeuf et de la poule: la Colombie n'est pas un Etat de droit à cause de la violence qui la gangrène, ou alors les acteurs de la violence ont les mains libres parce que l'Etat colombien est pourri de l'intérieur?

Thursday, September 21, 2006

Make money money, go shopping! Take money money, go shopping! (Gang Starr - The Mall)

Jeudi après-midi, la chaleur écrase tous les êtres vivants... J'appelle ma cousine Corina qui est ok pour sortir si je viens la chercher. J'appelle mon cousin Yeison qui est d'accord aussi mais vu où il habite c'est pas pratique qu'il vienne me chercher. J'appelle ma cousine Meliza, qui est partante mais il faut qu'on passe la chercher. Yeison appelle Meliza: il veut bien aller la chercher mais il me rappelle pour savoir où est-ce qu'on se retrouve tous ensuite? Bonne question, et c'est pas moi qui débarque qui vais pouvoir y répondre! On dirait que les cerveaux ont fondu sous le soleil... Finalement, dans un effort surhumain, je décide de me bouger et je débarque chez Corina en taxi. On va chercher Yeison et enfin Meliza et on part tous dans le centre-ville. On fait un petit tour puis on débarque dans le salon de coiffure de ma tante Rosa.

Tia Rosa a son salon dans le Centro Comercial Getsemani, face au Parque del Centenario. C'est un centre commercial "à l'ancienne", c'est-à-dire une succession de locaux qui abritent surtout des commerces de services: accès internet, salons de coiffure et d'esthétique, tailleurs... Les boutiques sont très petites, sans air conditionné et en enfilade sur un niveau.

Or la révolution à Cartagena et dans toutes les villes colombiennes, c'est l'apparition des centres commerciaux à l'américaine ou à l'européenne. Ceux que je qualifierai d'"européens" ce sont les centres commerciaux qui surgissent autour d'un hypermarché et qui restent à taille humaine. Ceux que je trouve plus "américains", ce sont les malls énormes avec cinéma multiplexe, étage restauration, magasins d'usine... Bien implantés à Bogota, ils arrivent maintenant dans les villes moyennes. A Cartagena le plus impressionnant est le Paseo de la Castellana: immense, climatisé, pourvu de tous les services te permettant d'y passer la journée (parkings, restauration, guichets automatiques...) et en plus architecturalement superbe (Paseo de la Castellana).

L'invasion de ce genre de centres commerciaux est étonnante, mais elle témoigne surtout de la formation d'une classe moyenne beaucoup plus importante et influente que par le passé. Car les courses à l'hypermarché, ce n'est pas le mode de consommation des plus pauvres: magasins éloignés de la maison, produits de marques dont on voit les pubs à la télévision, caddie plein pour le mois... et paiement par carte de crédit! De même pour les boutiques des centres commerciaux, où contrairement aux boutiques traditionnelles les prix sont affichés et non négociables. Idem pour les cinémas, manèges, jeux vidéos et karaokés car la classe moyenne a le temps et les moyens de s'offrir du loisir. Et par leur taille et leur emplacement stratégique, ils attirent aussi les riches qui viennent y faire des affaires et les pauvres qui font du lèche-vitrines.

C'est tout un autre mode de consommation et de divertissement qui émerge, et qui est le reflet des changements de la société et de l'économie colombienne. A côté du Paseo de la Castellana, le Centro Comercial Getsemani, pourtant situé en plein centre-ville, paraît bien passé de mode...

Wednesday, September 20, 2006

Ma mère m'a dit, Antoine, fais-toi couper les cheveux, je lui ai dit, ma mère, dans 20 ans si tu veux (Antoine - Les élucubrations)

Coucou me revoilà!! Comme il faut bien que je vous raconte mes aventures sous les Tropiques, je vais honteusement utiliser le post-datage pour vous raconter mon voyage au jour le jour.

Je suis donc arrivée à Cartagena le mercredi 20 septembre après-midi. Une petite heure de vol, une petite demi-heure de taxi et me voilà installée chez mon oncle Gilberto. Tio Gilberto a tois enfants: Jinner le rouquin de la famille (16 ans), Sandra qui me ressemble comme deux gouttes d'eau (13 ans), et le petit dernier José qu'on n'attendait plus mais qui est le bienvenu (11 mois). Mon oncle est jeune retraité de l'armée donc les deux ados étudient dans un collège-lycée militaire. Ils ne sont pas dans la section purement militaire de l'établissement mais dans la section "normale" qui est spécialisée sur les questions environnementales. Sac à dos vert militaire, uniforme encore plus strict que dans les autres écoles, pas une bouclette qui dépasse, et pour Jinner qui est "commandant": sport intensif pendant les 3 premiers mois de l'année scolaire, corvée de nettoyage du lycée le samedi matin et de temps en temps défilé en uniforme d'apparat le dimanche matin. Mais mes cousins ne changeraient de lycée pour rien au monde, d'autant que l'éducation y est meilleure que dans les autres lycées de la ville. Ils ont cours l'après-midi, de 13h à 18h. Le lycée est à l'autre bout de la ville mais un mini-bus scolaire vient les chercher et les ramène. Mon cousin, qui fait une spécialisation technique sur l'environnement, a aussi cours 3 matinées par semaine; il rentre à midi en traversant la ville à pied sous le cagnard pour économiser l'argent du transport et s'acheter bientôt un discman.

L'après-midi de mon arrivée, c'était la première scéance coiffure du petit dernier.

Ma cousine Meliza, qui a travaillé plusieurs mois dans le salon de coiffure de ma tante Rosa, fait office de coiffeuse pour bébés.

Tio Gilberto s'efforce de tenir le petit de façon qu'il bouge le moins possible. Peine perdue! Comme sa grande cousine française, il a bien compris que les coupes de cheveux étaient des séances de torture déguisées! Et c'est la crise de pleurs...

Finalement, le chien en peluche arrive à la rescousse et Meliza peut enfin faire les finitions. Une bonne demi-heure pour trois bouclettes!!


Sea, sex and sun... (Serge Gainsbourg - Sea, sex and sun)

Bonjour à tous!
Un très rapide coucou pour vous dire que je pars à Cartagena cet après-midi. Je vais voir ma famille et profiter de la plage, du soleil, du poisson grillé, de la musique dans les bus, des jus de fruit frais sur le bord de mer etc etc... Bon, c'est pas pour vous dégouter d'être à Paris, Montréal ou Bruxelles (ou Pushkar?), mais c'est la Caraïbe quand même :-)
Donc je me connecterai de temps en temps d'un cybercafé mais pour l'essentiel j'essaierai de me tenir à distance de tout ce qui est électronique pour profiter de mes vacances, alors le blog risque d'être en mode pause pendant 10 jours...
Gros bisous à tous!

Monday, September 18, 2006

Lord above, how can I love this thing that I abhor? Child of rape is growing in me (Noa - Mark of Cain)

Continuons un peu sur le thème des femmes et la société colombienne, sujet malheureusement inépuisable...

En mai de cette année, la Cour Constitutionnelle a partiellement dépénalisé l'avortement dans les cas spécifiques de viol, de graves malformations du foetus et quand la grossesse présente un risque vital pour la mère. Dans le premier cas, une plainte doit avoir été déposée ou un examen de médecine légale pratiqué, et dans les deux autres un certificat médical complet doit être présenté. En Colombie on estime à 300 000 le nombre d'avortements clandestins pratiqués chaque année, avec des conséquences gravissimes pour les femmes puisque c'est la seconde cause de mortalité chez les colombiennes!

Malgré l'accord de la Cour Constitutionnelle, la loi n'était pas encore réellement mise en application. Or le mois dernier, une grand-mère a porté plainte et demandé l'avortement pour sa petite-fille. La fillette de 11 ans était violée depuis l'âge de 7 ans par son beau-père et a fini par tomber enceinte, très probablement suite à ses premières règles. Devant l'urgence de la situation, les principales instances du pays ont clarifié le cadre de loi en quelques jours et la fillette a pu bénéficier du premier avortement légal du pays le 24 août. La Justice a également considéré que la mère n'était pas apte à s'occuper de son enfant puisqu'elle était au courant des aggressions et avait laissé faire, et la grand-mère s'est vu confier la garde de sa petite-fille.

L'évènement avait déjà réveillé le débat sur l'avortement en Colombie. Mais c'est la réaction de l'Eglise quelques jours après qui a provoqué l'indignation de la majorité de la population. Le Cardinal Alfonso Lopez Trujillo, président du Conseil Pontifical pour la Famille, a excomunié en bloc les médecins et responsables du Centre Hospitalier où a été pratiqué l'avortement, les membres de la Cour Constitutionnelle et la grand-mère de la petite, rien de moins! Il les a également qualifié de "malfaiteurs"... mais pas un mot sur le beau-père!!!

Dans un pays où l'écrasante majorité de la population est catholique (90%), la majorité d'entre eux pratiquants, et de la part d'un cardinal lui même colombien, la sentence a touché l'opinion publique en plein coeur. Il faut dire que le Conseil Pontifical pour la Famille est l'une des institutions les plus réactionnaires du Vatican. Le Cardinal Lopez Trujillo interdit par exemple l'usage du préservatif même pour les malades du SIDA, demande aux divorcés qui reforment un couple de vivre "comme frère et soeur" (sans relations sexuelles), et suggère -mon préféré!!-que les paquets de préservatifs mentionnent un avertissement pour la santé des consommateurs comme les paquets de cigarette. Un journaliste de la revue Semana a récemment écrit un article incisif sur le parcours de ce cardinal (rien que le titre: "El verdadero malhechor", il fallait oser!!), depuis l'époque où en tant qu'évêque de Medellin il aurait persécuté les curés les plus impliqués socialement dans les communautés. Plusieurs voix se sont également élevées qui l'accusent de liens avec le cartel de Medellin dans les années 70 et 80.

Mais la Colombie et les colombiens ne sont plus tout à fait sous la botte du Vatican, et la condamnation par le Cardinal d'un acte pratiqué en toute légalité a écoeuré l'opinion publique. La réaction de l'Eglise a été ressentie par beaucoup comme une ingérence dans les affaires séculaires du pays: considérations morales et éthiques mises à part, les médecins ont tout simplement appliqué la loi. Sur le plan religieux, elle a été vécue par beaucoup comme un abus de pouvoir sur les Catholiques, dans la mesure où la condamnation serait discutable sur le plan théologique (l'excommunication se justifiant peu d'après les spécialistes pour les médecins et membres de la Cour Constitutionnelle qui n'ont pas participé directement à l'acte). Beaucoup rappellent également l'omerta de l'Eglise à propos des prêtres pédophiles, surtout dans un pays comme la Colombie où les enfants subissent déjà de plein fouet la violence intra-familiale et celle de la guerre.

Les colombiennes ne sont pas sorties de l'auberge, mais elles donnent des coups de pied dans la porte...

Sunday, September 17, 2006

It's just me, myself and I (De la Soul - Me, myself and I)

Aujourd'hui ça fait un mois que je suis en Colombie. J'ai l'impression que ça fait une éternité.
Maintenant je me repère plutôt bien dans la ville. Je me perds moins dans le TransMilenio et j'arrive presque à repérer la buseta qu'il me faut. Je fais mes petites courses, je me pose dans le boui-boui le plus proche si j'ai faim, j'ai une bonne idée du prix des choses et je suis à peu près au courant de l'actualité. Les gens me ressemblent pas trop mal dans la rue, et c'est plutôt agréable... Je ne me sens pas étrangère, même si je ne m'habille pas vraiment comme les filles d'ici (mais bon, à Paris et à Montréal non plus!!!). Il faut dire que le stretch, l'ultra taille basse et le maquillage pot de peinture, j'ai du mal à m'y faire ;-)
Bon, quand j'ouvre la bouche, évidemment, c'est mort... Les gens compatissants me disent que je parle très bien, mais les gens de la rue ne s'y trompent pas. Après 2-3 phrases vient l'inévitable: "Usted no es de aca!". Des fois j'essaye d'esquiver en répondant qu'effectivement, je ne suis pas d'ici mais de Cartagena, mais ça ne convaint pas trop ;-) Quoiqu'une fois on m'a demandé spontanément si j'étais de la Côte. J'ai répondu fièrement que oui!! C'est à cause des traits: comme vous l'avez peut-être vu sur les photos, les gens ont des types très différents selon les régions. Ce ne sont pas les mêmes métissages; même si ce n'est pas une science exacte, on reconnaît à peu près la région d'origine des gens selon leur physique.
Mon espagnol est quand même devenu plus fluide. Je prends même les expressions de Bogota (ben oui, c'est comme à Montréal: bien obligée si on veut se faire comprendre!). Si je reste ici je finirai par prendre l'accent, et là c'est une autre affaire: ma famille va être morte de rire. Imaginez quelqu'un originaire de Marseille qui revient avec un accent ch'ti et vous aurez une idée de ce que je veux dire :-D
En plus, le langage à Bogota est très alambiqué. Pour dire bonjour, c'est tout plein de salamaleks qui n'ont rien à envier à l'Afrique. Quand on rencontre quelqu'un -même pour la première fois- c'est un bombardement de questions, qui d'ailleurs n'attendent pas forcément de réponse: "Buenos dias! Que tal? Que hubo? Como le va? Como le fue? Como le ha ido?..." En général après la 2e question je reste bouche bée et j'attend que le flot se tarisse... Pour acheter quelque chose dans la rue c'est pareil. Sur la Côte on dirait à peu près: "Oye 'mano! La vaina esa a como es?" ("Eh mon pote c'est combien ton truc?") alors qu'à Bogota on dit: "Me hace el favor y me regala esto, si fuera tan amable..." (en gros: "Vous seriez bien aimable de m'offrir ceci, si cela ne vous dérange pas trop"). Et ensuite on se répand en remerciements et on souhaite une très très bonne journée et que tout aille pour le mieux pour vous (voire que Dieu vous bénisse...).
Parfois ça me laisse perplexe, mais ça a un certain charme suranné. Des gens d'ici m'ont dit que cela venait du fait que Bogota a toujours été la capitale administrative, juridique et bourgeoise du pays. Du coup les gens utilisent des tournures de phrase super alambiquées pour dire des choses simples, ou encore partent dans des argumentations interminables et à la fin tu ne sais même plus de quoi on essayait de te convaincre (style cher aux avocats et aux professionnels de la politique, n'est-ce-pas?). Une amie m'a raconté la blague suivante: un homme de Bogota part le matin au travail. Au bout de la rue il se rend compte qu'il a oublié quelque chose et il fait demi-tour. Arrivé chez lui, il trouve sa femme au lit avec un autre homme. Son épouse le regarde et s'exclame: "Ay, que pena con el caballero!" (à peu près: "Quel contretemps mon bon monsieur!"). Hehehehe...

Friday, September 15, 2006

She's got the kind of look that defies gravity (Shakira - Don't bother)

Pendant les travaux, les ouvriers étaient très étonnés que je puisse survivre sans télé. Effectivement, il n' y a pas de télé dans l'appartement, ce qui ne m'empêche pas d'être au courant du dernier phénomène télévisuel colombien: la série "Sin tetas no hay paraiso" (traduction libre: "sans nichons, pas de paradis!".

Cette telenovela est tirée du roman du même nom de Gustavo Bolivar Moreno, basé sur des faits réels et paru l'année dernière. Voici l'histoire (explications linguistico-sociologiques plus bas). Accrochez-vous, c'est "Amour, Gloire et Beauté" version trash:

Catalina est une jeune femme fascinée par l'argent et le luxe. Pour accéder à son rêve, elle tente d'approcher les "traquetos". Or, sa petite poitrine constitue un frein à ses ambitions. Pour obtenir l'argent pour se faire opérer, elle devient une "chica prepago". Finalement, elle trouve un chirurgien plastique qui accepte de lui poser les faux seins dont elle rêve ... en échange de faveurs sexuelles... Grâce à sa nouvelle paire de seins, elle est introduite dans le milieu des narcotrafiquants et réussi même à en épouser un. Mais le passé la rattrape et des problèmes avec ses implants mamaires mettent sa vie en danger...

Les "chicas prepago" sont des filles qui se font entretenir en échange de faveurs sexuelles. "Prepago" vient des recharges de téléphone portable prépayées. Il y en a de 10 000, 20 000 pesos ou plus, tout comme les tarifs de ces demoiselles, qui cependant n'accepteraient jamais d'être qualifiées de prostituées... Parfois elles sont aussi appelées "CDT", c'est-à-dire "carne de traqueto" (chair à traquetos).

Selon les termes d'un collègue bloggeur: "Traquetos se les dice en nuestro país esos oscuros personajes, que gracias al negocio de la droga salen de la nada y despilfarran el dinero en lujos, ostentaciones y hermosas niñas de diminutas cinturas y pechos grandes" (Lucas por dentro y por fuera). En français: les traquetos sont des narcotrafiquants qui grâce à l'argent de la drogue vivent dans le luxe et s'entourent de jolies filles dotées d'une taille fine et d'une forte poitrine.

Cette série a déclenché un phénomène de société en Colombie. Tout le monde en parle, dans la rue, dans les familles, dans tous les médias... C'est analyse et contre-analyse, sondage et contre-sondage... Selon la revue Cambio, les seins ne sont pas importants pour 80% des hommes. Une chroniqueuse de la revue Semana a décrit une trentaine de mots pour dire "seins" ainsi que leurs usages sociologiques... Une chaîne de télé a fait une émission spéciale de... 7h sur le thème des seins!!!!

D'un autre côté un radio surfe sur la vague, mais pas vraiment celle de l'indignation... Grâce à son jeu "Sin tetas no hay gozadera", elle offrira à deux auditrices une nouvelle paire de seins! Je ne résiste pas à la tentation de vous transcrire la pub pour le jeu. La première fois que je l'ai entendue j'ai cru que c'était une parodie, mais non...

Un groupe chante:
"Son muy pequeñas! Son muy pequeñas!"
Une voix masculine enchaîne:
"Si estas cansada que te repitan esto todo los dias... Si estas cansada que te digan que... sacaste las de tu papa!..."
Une voix féminine genre "La Minute Blonde" répond:
"Papito, yo ya le estoy amando muuuuuuuucho..."
homme: "Olimpica 105.9 te pone a gozar, porque sin tetas no hay gozadera!"
femme: "Olimpica me va a poner muy liiiiiiiiinda"
homme: "Regalaremos las tetas que tanto has deseado; 2 oyentes dejaran de tener doble espalda!"
femme: "Cumplame ese deseito papi, siiiiiiiiiii"
homme: "Si quieres ganar, solo tienes que estar pendiente de Olimpica 105.9. Olimpica te pone a gozar..."
femme: "Porque sin tetas, no hay gozadeeeeeera"

Difficile de traduire en français, mais en gros, pour deux auditrices qui auraient hérité des seins de leur père (sic) la radio offrira la paire de seins dont elles ont toujours rêvé et qui leur permettra de ne plus avoir deux dos (re-sic), parce que sans nichons, c'est pas la fête (re-re-sic!!!!!).

Dans la famille on n'a pas ce problème! Une de mes tantes vient de se faire REDUIRE la poitrine et apparemment ça lui a changé la vie. Parece que con tetas tampoco hay paraiso...

Thursday, September 14, 2006

La p'tite abeille a travaille fort (Daniel Boucher - La désise)

Alors comme ces derniers jours j'étais enfermée avec les ouvriers 10h par jour, j'ai eu tout le temps de discuter avec eux, et surtout avec Don Luis, que vous avez déjà vu sur les photos.

Don Luis est celui qui est resté le plus longtemps jusqu'à maintenant, parce que c'est un ouvrier spécialisé dans le bois et c'est donc à lui que revient le travail de précision. En fait il est sous-traitant pour l'entreprise qui pose les parquets, et il est appelé en renfort pour la finition.

Don Luis a entre 55 et 60 ans environ. Il vient d'un village dans le département du Santander (à mi-chemin entre Bogota et la côte Caraïbe). Il est devenu orphelin étant encore enfant et il a grandi en se débrouillant plus ou moins seul. Il a finit par être recueuilli par un orphelinat, mais c'était déjà trop tard pour qu'il puisse aller à l'école primaire et il a donc commencé à travailler. Jeune garçon, avec son frère, il a défriché des terres dans sa région natale. Après quelques années, l'Etat leur a octroyé des titres de propriété pour ces terrains: 100 hectares pour lui, 150 pour son frère.

Don Luis s'est marié très jeune. Il a eu une première fille, mais son épouse est morte en donnant naissance à leur deuxième fille. A cette époque, les mouvements de guerrilla prenaient leur essor en Colombie. L'ELN (Ejercito de Liberacion Nacional), un mouvement de guerrilla essentiellement paysan a justement été créé en 1964 dans le département du Santander. Dans les années 70 la région a été le théatre d'affrontements très violents entre la guerrilla et l'armée régulière, poussant la population locale à la fuite. Don Luis dit que s'il avait attendu quelques semaines de plus, il ne serait plus là pour raconter. Il est parti avec quelques affaires et sans ses filles, qui sont restées avec sa belle famille. Il a perdu toutes ses terres et même aujourd'hui il n'y a apparemment aucun moyen de les récupérer.

Don Luis est arrivé à Bogota en 1976. Il s'est spécialisé dans le travail du bois. Dans les années quatre-vingt il a eu un grave accident de travail: une machine lui a pratiquement sectionné la main gauche. Il a accouru à l'hôpital, où les chirurgiens ont d'abord voulu l'amputer. Don Luis a refusé. Les médecins l'ont recousu mais il n'a pas eu tous les soins nécessaires non plus. Du coup il n'a pas récupéré toute la mobilité de sa main et de ses doigts: sa main gauche est tordue vers l'intérieur et ses doigts se peuvent pas se refermer pour saisir les petits objets. Il peut quand même s'aider de sa main gauche pour travailler, mais elle se fatigue beaucoup plus vite que la droite.

Don Luis a refait sa vie à Bogota. Il a deux filles et deux garçons entre 4 et 19 ans avec Doña Belén, qui doit avoir une dizaine d'années de moins que lui. L'aînée est déjà partie du foyer, vit en union maritale et a un bébé. Doña Belén est cantinière pour l'école du quartier. La semaine, elle fait la cuisine pour 300 enfants, et le week-end elle vient aider Don Luis sur ses chantiers. Ils vivent dans une petite maison qu'ils ont acheté à Soacha, au sud de Bogota. Pour arriver jusqu'à l'appartement ils ont entre 1h30 et 2h30 de transport. Bientôt ils vont élever un étage pour agrandir la maison.

Don Luis est payé à la tâche, donc il ne compte pas ses heures. Pour la pose et le ponçage du plancher, il est payé 9000 pesos (3€) le mètre carré. Pour l'appartement cela lui a donc fait une trentaine de mètres carrés, et il y a passé plusieurs journées de 9h de travail non stop en moyenne. Il travaille tous les jours que Dieu fait et n'a pas pris de jour de congé depuis 6 mois. Il dit qu'à la maison il tourne en rond: il préfère aller travailler et gagner de l'argent. Don Luis peut gagner jusqu'à 4 millions de pesos (1 300€) certains mois, ce qui est un très bon salaire en Colombie. Un jeune diplômé universitaire, par exemple, commence à 1,5 - 2 millions de pesos mensuels.

Don Luis a commencé à apprendre à lire, écrire et calculer il y a 3 mois. Il lit bien les chiffres car c'est ce dont il se sert le plus pour travailler (pour lire le mètre ruban par exemple). Il sait additionner et un peu soustraire, mais pas multiplier ou diviser. Pour ça, il se sert de sa calculette. Pour les lettres, il reconnaît les mots, ce qui lui permet de vérifier qu'il ne signe pas n'importe quel contrat, mais pour l'instant il est plus à l'aise si on lui lit. Il sait écrire son nom et son numéro de carte d'identité (essentiel en Colombie, on te le demande 10 fois par jour).

Voilà! Don Luis a terminé le parquet ce soir à 20h et a reçu le solde de tout compte. Il avait déjà deux autres chantiers en cours. Chômage? Connais pas! Repos non plus... La p'tite abeille a travaille fort... bzzz bzzz bzzz....

Wednesday, September 13, 2006

This is the end, my only friend, the end (The Doors - The end)

Les travaux se terminent enfin!!! Quelques images:

Un dernier coup de ponçage...

Multiprise à la colombienne!!!!!

Don Luis applique un produit qui fixe le bois: dernière finition!

Ca y est!!! Tout le matériel est rangé et prêt à partir devant la porte!!!

Plus de bruit, d'ouvriers, d'air saturé de poussière... Mais 70m² de sols et murs à nettoyer! Juste fais-le!

Monday, September 11, 2006

It's been a long time, we shouldn't have left you without a dope beat to step to (Aaliyah - Try again)

Aujourd'hui c'est le 11 septembre. Ca me rappelle plein de choses.
C'est banal à dire, mais évidemment je sais exactement comment s'est passée ma journée du 11 septembre 2001. J'étais à Montréal avec Wilfried et c'était une matinée magnifique. Ce jour-là on devait aller au Consulat de France donc on s'est reveillés à 8h. On a allumé la radio en déjeunant, et on a entendu parler du premier crash sur le World Trade Center. On n'en croyait pas nos oreilles alors on a allumé l'ordi pour regarder sur le site de ITV. Presqu'en direct on a vu le 2e avion se crasher dans la 2e tour. Je me souviens du commentateur qui disait que 45 000 personnes travaillent tous les jours dans les deux bâtiments.
On a fini par se dé-scotcher de l'écran pour partir au Consulat, où on est arrivés vers 10h. Dans la salle d'attente une grande télé était branchée sur CNN, et on a vu les tours s'écrouler l'une après l'autre. Le fonctionnaire, imperturbable, s'est occupé de la carte d'identité de Wilfried (chanceux: pour 10 ans il est domicilié à Montréal sur sa carte d'identité ;-) ). On est rentrés tranquillement en se disant que rien ne pouvait nous arriver à Montréal: le Canada passe pour le gentil de la planète donc pas trop d'inquiétudes... Le soir on a entendu que le Canada était en alerte maximale et avait dû acceuillir tous les vols en provenance d'Europe. Dans les provinces Maritimes, c'était le foutoir et la solidarité pour héberger et nourrir tout ce monde (40 000 passagers dans 255 vols arrivés en quelques heures).
Les jours suivants c'était un peu la panique (évacuation de la Place Ville-Marie à Montréal; c'est sûr c'est un symbole du capitalisme mondialement connu, sic...) et la pluie d'accusations (les amércains ont découvert ce jour-là que la frontière était effectivement une vraie passoire...). Mais on sentait surtout l'angoisse des gens, car énormément de montréalais ont de la famille à New York (surtout les juifs hassidiques et les Haïtiens, mais pas seulement).
A l'Université de Montréal, impossible pour les profs de donner des cours normaux pendant plusieurs jours: à chaque fois ça se transformait en débat -limite pugilat- sur les causes et les conséquences des attentats (ben oui: département de Science Politique oblige...). Les profs ont fini par organiser une conférence débat pour faire retomber le soufflé. Je me rappelle encore de l'intervention de Lawrence McFalls. C'est un prof anticonformiste, génial et un peu farfelu (s'il me lit: no offense!), et fidèle à lui-même il a souligné la symbolique voire l'esthétisme des Tours en train de s'écrouler. Ca a pratiquement déclenché une émeute dans l'amphi; les étudiants criaient de partout que c'était une honte de dire un truc pareil alors que des milliers de gens étaient morts, qu'il s'agissait de terrorisme un point c'est tout, qu'on avait pas à en tirer une analyse lyrique... Moi j'ai trouvé que son analyse avait du sens, mais il fallait oser l'exprimer quelques jours après les événements. Après tout, les terroristes ont clairement recherché la symbolique de leur cible. Et puis c'est une sorte de légende de Babel contemporaine: attention, vous avez beau construire des Tours de plus en plus hautes, si vous ne cultivez pas la paix vous en paierez le prix... Enfin c'est sûr qu'un étudiant spécialisé en Relations Internationales s'attardera pas sur une analyse philosophique du 11 septembre, mais moi je trouve ça original :-)
Au mois de décembre suivant on est rentrés à Paris pour Noël et on n'a jamais plus eu de billet aussi peu cher vu que personne ne voulait prendre l'avion. Par contre pour l'exportation de fromages qui puent, c'était bel et bien fini!!
A part ça me souvenir du 11 septembre 2001 c'est aussi me souvenir que ça fait 6 ans que j'ai posé les pieds à Montréal et ça fait tout drôle! Dire que l'année prochaine je fêterai les 10 ans de mon Bac. Pfffiioouuuu....

Sunday, September 10, 2006

The roof, the roof, the roof is on fire! (The Soca Boys - Follow the leader)

Comme ces jours-ci je suis bloquée à la maison par les travaux, j'ai le temps de profiter de la vue! En voilà quelques échantillons:
Les immeubles qui grimpent sur les flancs des cerros... Comme vous pouvez le voir, ici la plupart des immeubles sont rouges. C'est joli au coucher du soleil...

Vue plongeante sur le petit patio couvert d'un immeuble voisin. Dans le quartier, beaucoup d'immeubles ou de résidences ont des cours intérieures, des patios ou des jardins d'hiver. On ne voit rien de la rue, mais de l'appartement on en distingue plusieurs.

Une résidence voisine de style colonial, magnifique. L'entrée est fermée par une arche avec un gardien, donc l'espace entre les immeubles est pratiquement une rue intérieure. Balcons en bois, toits en tuiles, petit jardin sous les arches... un bijou!

Le toit de la Faculté des Beaux Arts de l'Universidad Pedagogica Nacional. Les étudiants viennent sur le toit pour s'isoler et répéter ou tout simplement pour prendre une pause café au soleil... Toute la journée on entend des quatuors à vent, des gammes de divers instruments, du chant lyrique, parfois des rythmes plus locaux comme la cumbia... Sympa!

Voilà! Après l'intérieur vous avez donc eu l'extérieur!

Friday, September 08, 2006

J'ai rien prévu pour demain mais c'est déjà bien d'y penser; je pense que demain matin j'aurai du mal à me lever (Tryo - j'ai rien prévu pour demain)

Comme je vous le disais, l'appart est donc sens dessus dessous et à nouveau rien ne va comme prévu (tiens, ça me rappelle une certaine coupure d'eau...). Chaque jour les délais s'allongent et notre patience rétrécit...

Dernier épisode en date: aujourd'hui je me lève à 6h du mat' pour tout préparer pour les travaux du jour (ponçage du parquet accompagné d'un doux bruit de moteur rugissant de 8h à 18h, avec sa délicate poussière et son asphixie garantie...). Résultat: à midi toujours pas d'ouvriers. Verdict: après avoir posé le plancher il faut attendre au minimum 24h pour que ça sèche donc ils ne prévoyaient pas de venir avant 14h (alors que l'ouvrier m'avait assuré de sa présence à 8h). Hier j'ai dû annuler un rendez-vous pour pouvoir rester à la maison tout le vendredi... pour rien! Pour compenser ma matinée bloquée à la maison (et sûrement aussi parce qu'ils n'ont pas envie d'affronter ma colère) on convient qu'ils viennent demain matin à 8h pour poncer. We'll see...

Le temps d'un coup de fil à Môman sinon après avec le décalage horaire c'est trop tard, je file à la banque. Et... j'arrive trop tard! Plus de change après 14h; on est vendredi et c'est pareil dans toutes les banques. Oh joie: 300 pesos (0,1€) jusqu'à lundi! J'ai de quoi m'acheter une sucette pour me consoler...

Thursday, September 07, 2006

I've got the Midas Touch, everything I touch turns to gold (Midnight Star - Midas Touch)


A la décharge des ouvriers, ce parquet n'est pas de tout repos!

Ils ont des caisses avec des morceaux de différents bois de différentes tailles, et ils reproduisent le motif au fur et à mesure.

Certaines pièces sont mal découpées donc ils les mettent de côté et en prennent un autre, comme un puzzle.

Arrivés aux bords, il faut redécouper les pièces unes par une à la bonne taille, à la main et sans gants, aïe aïe aïe, on a mal aux doigts rien que de les regarder faire!

Mais le résultat est là. C'est déjà très beau, et ça sera magnifique quand ça sera terminé. Dommage, c'est pas chez moi ;-)

Wednesday, September 06, 2006

Passe em casa, tô te esperando (Tribalistas - Passe em casa)

Comme promis, je vous fait visiter l'appartement:
Don Luis qui installe le parquet dans "ma" "chambre"...
Le bureau, avant que le parquet soit installé et après que la moquette ait été arrachée...
La cuisine, transformée en entrepôt de matériel...
Le dernier salon où l'on cause, ou plutôt où l'on dort...
Bon c'est un très bel appart' mais c'est sûr que pour l'instant ça se voit pas trop! J'oublierai pas de vous montrer l'appart fini.

Tuesday, September 05, 2006

Could it be that it's just an illusion putting me back in all this confusion? (Imagination - Just an illusion)

Juste un petit mot pour vous dire que l'appartement où je suis hébergée est en train d'être refait complètement. Ce sont les grands travaux (ceux de Don Luis, pas ceux d'Astérix...) donc ENTRE AUTRES on n'a pratiquement plus accès à internet. Je vais bientôt publier quelques photos pour que vous compreniez mieux l'ampleur du truc. Franchement, ça vaut le coup d'oeil!!
Pour vous donner une idée: les chambres sont vides et tous les meubles de la maison sont rapatriés dans le salon. On campe donc dans le séjour sans rideaux (et avec un maginifique vis-à-vis!) au milieu d'une épaisse couche de poussière. C'est vrai qu'après mes péripéties de départ, je suis rodée...
Maintenant, en plus d'être "sans-papière", je suis donc "desplazada" (comme on appelle ici les réfugiés internes)!

Monday, September 04, 2006

Le funky takini est de retour sur la place! (Mad in Paris - Funky Takini)

J'ai enfin fait cirer mes bottes!! Ca faisait au moins un an et demi que je l'avais pas fait, et elles étaient crades comme pas possible. Je voyais que des hommes cirer et se faire cirer les pompes donc j'hésitais un peu, mais je pouvais décemment pas me rendre à un entretien avec des chaussures pareilles. Pour quelle raison y'a-t-il autant de cireurs de chaussures en Colombie? A cause de la poussière dans les villes? A cause de la tradition du travail du cuir? Je n'ai pas les réponses mais je n'en ai jamais vu dans le Maghreb, par exemple... Il y a tous les styles: de l'ado qui traîne sa boîte à cirage dans la rue au cireur en uniforme avec emplacement, siège et coussin.
Sur la place de l'Eglise Nuestra Señora de Lourdes il y a un cireur tous les 2 mètres sur tout le tour de la place, et à l'heure du déjeuner le business marche fort. Sur des sièges en bois, une dizaine de messieurs en costard prêtent négligemment le pied pendant qu'ils lisent le journal d'un air satisfait; de temps en temps, un coup d'oeil d'Inspecteur des travaux finis... Je demande le prix à un cireur libre (1500 pesos, 0,5€) et je m'assieds timidement. Je fais mes comptes histoire de me donner une contenance... A côté de moi, un autre client s'installe avec des chaussures en cuir déjà impeccable; il doit avoir un rendez-vous vraiment super important! Le cireur et ses collègues ont tous des chaussures en cuir qui brillent tellement qu'on peut se voir dedans: la façon la plus simple de faire sa pub!
Le cirage de pompes, c'est toute une technique. Au figuré sans aucun doute, mais au sens propre aussi. D'abord un coup de chiffon puis un peu d'eau pour enlever la poussière. Une première application de sans doute quelque chose pour nourrir le cuir, on étale avec un chiffon puis on brosse. Et rebelotte. Autre pied, idem. Pied gauche à nouveau: une première couche de cirage. On étale, nouveau coup de brosse (pas la même, une plus dure). On lustre avec un chiffon doux. On remet du cirage sur les endroits qui ont vécu et on recommence. A nouveau un peu d'eau, un bon coup de brosse et de chiffon. Listo!
Mes bottes ont l'air plus neuves que le jour de l'achat...

Saturday, September 02, 2006

Ojala que llueva cafe en el campo... (Juan Luis Guerra - Ojala que llueva cafe)

Hier, croyez-le ou non, j'ai bu la première tasse de café entière de ma vie.
J'ai jamais aimé ça, sauf pour faire un "canard", c'est-à-dire tremper un morceau de sucre dedans (aucune idée si c'est la terminologie familiale ou si tout le monde appelle ça comme ça :-D ). J'ai l'habitude de dire que je dois avoir un ancêtre britannique perdu, parce que je carbure au thé: ni café colombien, ni vognoble français!
Hier j'ai été invitée dans une réunion de travail. J'ai bien réussi à échanger la tasse d'acceuil de 9h contre un verre d'eau. Mais à 10h, plus moyen d'y échapper: un assistant est arrivé avec une tasse pour chaque participant. Ca aurait été malpoli de refuser une deuxième fois... De toutes façons dans le pays du tinto il fallait bien que ça m'arrive tôt ou tard!
Allez, c'est parti, on fait un effort. Ca sent super bon... Dans le doute, je mets quand même un sucre, et je me lance... Iiiiiaaaarrrrrkkkkkk... C'est amer, au secours!! Diantre, le panier avec le sucre est reparti à l'autre bout de la table... Bon, une gorgée d'eau. Une deuxième gorgée de café... Ouaaah, c'est vraiment par respect pour mes gènes!
Au bout de quarante minutes j'ai enfin réussi à terminer ma (petite) tasse de café. Heureusement, j'avais à peine fini qu'est arrivé l'en-cas de la matinée: chocolate y almojabana. Sauvée! Ici, le chocolat chaud surprend le palais européen parce qu'il est la plupart du temps à base d'eau et non de lait. Mais le chocolat est tellement plus parfumé que ça ne devient pas du jus de chaussettes comme en France. Il y a aussi souvent des épices dedans (cannelle par exemple...). Les almojabanas sont des petits pains à base de farine de maïs et de fromage. Quel soulagement!
Bon, au moins j'ai respecté le patrimoine national. Car attention le café c'est un symbole national presque au même titre que l'orchidée, le condor et le palmier de Quindio (les symboles officiels). Et ici on rigole pas avec le patriotisme: du ministre à la vendeuse de rue, on porte un bracelet avec les couleurs du drapeau. L'hymne national est diffusé régulièrement à la radio, même sur l'équivalent de NRJ, et du coup on l'entend jusque dans les endroits les plus incongrus (au supermarché par exemple!!!). La pub en particulier est super patriotique ("Colombia es unica, Colombiana es unica!", pour la bière du même nom...) Mais le comble c'est justement la pub Aguila Roja, une marque de café:
Là, il faut s'imaginer une musique super pompeuse, et un chant genre touché par la grâce:
"Abrazame Colombia, que no tengo miedo...
Abrazame Colombia, que sé que puedo...
Abrazame Colombia, para volver a confiar...
Abrazame Colombia, que quiero amar!
Tu eres mi historia y todo en lo que creo
Abrazame Colombia, arriba! Animo!"
Puis une voix tonitruante:
"Tomémonos un tinto... seamos amigos!
Café Aguila Roja!
Calidad Certificada!"
Amen!

Friday, September 01, 2006

Speed freak, faster than a speedin' bullet (Jamiroquai - Travelling without moving)

Aujourd'hui j'ai pris la buseta pour la première fois. C'était compliqué de prendre le TransMilenio, donc je me suis lancée! Sur les busetas on se repère de plusieurs façons: les Colombiens connaissent les couleurs des différentes pancartes et sont capables de les repérer au loin. Sinon sur les pancartes, les rues principales du trajet et/ou les quartiers traversés sont indiqués. Seul problème: les bus arrivent à fond, je suis myope et je connais pas encore la ville comme ma poche! Il n'y a pas d'arrêts de bus donc on se met le long du trottoir et on hèle le bus, comme un taxi.
J'avais bien repéré le plan: c'est le fameux trajet sur les carreras 11-13-10. Bon, j'ai laissé passer 2 ou 3 busetas parce que je me rendais compte qu'au dernier moment que c'était le bon trajet, mais finalement j'ai réussi à grimper dans la bonne. La buseta s'arrête un quart de seconde donc tu t'accroches à la barre et tu grimpes plus ou moins gracieusement pendant qu'elle redémarre... Là, tu passes le tourniquet et tu payes (1000 pesos), puis tu vas t'asseoir, ou du moins tu essayes. Soit parce que la buseta est déjà repartie à fond dans le traffic et que tu manques de t'étaler sur tes voisins. Soit parce que tu t'entasses à 15 personnes debout dans 1 m² alors que toutes les busetas affichent fièrement: "Servicio Ejecutivo: no se admiten pasajeros de pie" (Service de luxe: passagers debout non admis)!
Par principe, le chauffeur conduit comme si sa vie en dépendait. Dès qu'il peut, il se met sur la voie de gauche pour aller plus vite. Ce qui ne l'empêche pas de déboîter à la Montoya et de traverser 3 voies de circulation pour faire monter un nouveau passager! Heureusement, si l'on peut dire, les rues sont à sens unique... Lorsque le véhicule devant n'avance pas assez vite, c'est la technique de l'intimidation: klaxon, distance de sécurité de 2mm, on commence à déboîter pour bien montrer qu'on peut pas attendre... A mi-parcours la buseta s'arrête et le chauffeur échange quelques mots avec un "chronométreur", qui lui indique son "temps de parcours". A l'occasion ce matin, le chauffeur signale un problème d'équilibrage des pneus. Un coup d'oeil du chronométreur, qui conclue que ce n'est rien. En mon for intérieur, j'émets quelques doutes... A chaque freinage et accélération il s'agit d'être vigilant: la conduite est tellement "souple" que c'est le coup du lapin assuré :-D Pour descendre on appuie sur le bouton ou, s'il y a trop de monde, on demande l'arrêt ou plutôt on crie à travers le bus pour qu'il s'arrête. Heureusement comme les rues sont numérotées on voit à peu près où s'arrêter. On descend aussi gracieusement qu'on est monté car le premier pied a à peine touché terre que la buseta est déjà repartie.
Ca, c'était l'aller. Pour ne pas que vous me preniez pour une chochotte ou une Marseillaise, voici donc le retour. Toute fière d'avoir réussi mon premier trajet en buseta, pourquoi revenir par un autre moyen de transport? Je fais donc signe à une buseta, bien moins pleine qu'à l'aller car on n'est plus en heures de pointe. Je peux donc prendre place sur un siège "couloir" à côté d'un jeune homme. La buseta file à travers la ville et je compte les calles en me cramponnant au siège pour pas être trop secouée. Une vendeuse de cacahuètes monte dans la buseta et propose sa marchandise. Elle explique que les temps sont durs mais que Dieu nous bénira de lui venir en aide et nous le rendra au centuple... Quelques passagers lui en achètent.
Soudain... POW!!! Ma buseta va se fracasser contre une autre plus grosse qui tournait!!!!! Mon voisin, moins sur ses gardes que moi et assis côté fenêtre est tout ébahi: la buseta est enfoncée pile à notre hauteur. Les paquets de cacahuètes ont volé à travers la buseta mais heureusement, personne n'a rien. Pendant que les passagers se remettent de leurs émotions, la vendeuse nous affirme que s'il ne nous est rien arrivé, c'est bien parce que les passagers ont été généreux, et que Dieu a veillé sur nous!! Sans éteindre le moteur, le chauffeur descend et va parlementer avec l'autre, de la même compagnie justement. C'est de la faute de notre chauffeur -tous les passagers sont d'accord- mais c'est notre buseta qui est touchée parce qu'elle est plus petite et à cause de la trajectoire. Après 10 minutes de négociation, les chauffeurs parviennent à un règlement à l'amiable. Surprise! C'est notre chauffeur qui récupère le dédomagement! On repart donc, encore plus vite qu'on est arrivés vu que maintenant il a pris du retard!!
C'était mes 2 premières expériences en buseta... D'un côté: Vive le TransMilenio! De l'autre, errrr... les chauffeurs du TransMilenio sont d'anciens chauffeurs de buseta "recyclés"...