Monday, October 29, 2007

Comme tout citoyen je suis censé aller voter, histoire de dire que j'existe dans leur communauté (113 - Princes de la ville)

Hier dimanche, c'était donc les élections municipales, des conseillers municipaux et des représentants de quartier, et des gouverneurs et membres des assemblées de départements. Depuis deux jours, la vente d'alcool est interdite dans tout le pays, et l'Armée et la Police multiplient les barrages. Quant à moi cela faisait déjà un moment que je cherchais à me renseigner sur le bureau de vote qui m'avait été assigné et à me former au vote selon les modalités locales.

Car laissez-moi vous dire que voter en Colombie n'est pas une mince affaire! Pendant notre voyage, avec Mag, on a vu quantité d'affiches électorales. Dès que l'on change de quartier les affiches changent, car c'est aussi l'élection des membres des Consejos Distritales et des Juntas de Acción Local. Dans une ville comme Bogotá, ça donne plus de 700 candidats au poste de conseiller municipal pour 45 élus, et pour les 7 à 13 élus à la JAL pour chacune des 20 localités, je vous laisse imaginer le nombre de candidats...

Mais en plus, les modalités de vote sont aussi à s'arracher les cheveux. Pour les maires et les gouverneurs c'est facile: les élections sont uninominales donc on vote pour 1 candidat par parti (ou indépendant, ou vote blanc). Mais pour les assemblées départementales, les conseils municipaux et les JAL, les élections sont par listes, qui peuvent autoriser un système de "voto preferente". KEZAKO? Eh bien, contrairement au vote par listes habituel, où les sièges sont attribués dans l'ordre (établi à l'avance par le parti) des candidats, si le "voto preferente" est autorisé on vote pour une liste ET pour un candidat. Le parti est alors obligé de respecter le nombre de vote obtenu par chacun de ses candidats dans l'attribution des sièges. C'est un système qui permet plus de participation des citoyens au sein des partis dans des scrutins locaux où il serait irréaliste d'organiser des primaires. Mais du coup, c'est horriblement compliqué car chaque candidat est identifié par son parti ET son numéro. Heureusement les électeurs ont le droit d'emporter avec eux tout document pouvant les aider à se rappeler pour qui ils veulent voter.

Des points d'information répartis dans toute la ville renseignait les gens à propos de leur bureau de vote. Seulement, quand l'employée a mis mon numéro de cédula dans l'ordinateur = rien! Des amis m'affirment que les gens qui n'ont pas fait enregistrer leur cédula peuvent voter dans un bureau spécialement prévu pour eux, à Corferias (l'équivalent de la Porte de Versailles, où ont lieu toutes les Foires). Je consulte donc Internet, et je trouve d'abord des infos encourageantes: apparemment Corferias reçoit toutes les personnes dont la cédula a été émise après 1980 et qui ne sont enregistrés nulle part. Je décide quand même de téléphoner à la Registraduría pour me faire confirmer l'information. Et oh surprise! On me répond que non, moi c'est pas possible. En effet, depuis 2006, toutes les nouvelles cédulas emises sont automatiquement enregistrées sur le lieu de l'émission, pour éviter justement qu'il y ait trop de gens sans bureau de vote fixe. Or ma cédula a été émise... par le Consulat de Colombie en France!!!! Je suis donc censée voter là-bas!!! Théoriquement j'aurai pu faire le changement de bureau de vote pour voter à Bogota, seulement ce n'était possible qu'en mai 2007...4 mois AVANT que je reçoive ma cédula! Bon ben voilà, c'est râpé pour cette fois... Il me faudra encore attendre un peu pour voter en Colombie. En attendant je vais tâcher de mieux comprendre comment remplir le bulletin de vote!!!

Finalement c'est à nouveau le Polo Democrático Alternativo, le parti de gauche, qui a gagné la Mairie de Bogotá en la personne de Samuel Moreno. Cela a constitué un énorme camouflet pour le Président Uribe, qui avait ouvertement (et de façon plutôt sans-gêne) appuyé la candidature de Enrique Peñalosa, ancien maire de Bogotá de 1998 à 2001 et artisan de la transformation urbanistique de la ville. D'ailleurs, contrairement à l'usage et alors que la Mairie de Bogotá se situe à un pâté de maison du Palais présidentiel et en face de l'Assemblée Nationale, Uribe a refusé de rencontrer Samuel Moreno pour le féliciter. Il faut dire que sur la scène politique nationale, le Maire de Bogotá est le 2e personnage politique le plus important après le Président de la République. Monsieur le Président s'est donc vexé... Les deux hommes politiques ne se croiseront pour la première fois qu'en... février 2008!!!

Plusieurs candidats ont été élus contre tous les pronostics, et surtout contre des caciques inscrustés dans la vie politique locale, ce qui a représenté une jolie consolidation de la démocratie (à Cartagena par exemple). C'est surtout dû à l'onde de choc du scandale de la "Para-Política", qui a mis à découvert depuis 2006 les liens entre certaines personnalités politiques à tous les niveaux et les groupes paramilitaires responsables de centaines de massacres et exactions depuis les années 80-90. Mais bien que ce scrutin ait été l'un des plus "calmes" depuis longtemps, beaucoup ont dénoncé le fait que la violence s'est exercée avant les élections pour contraindre certains candidats à se retirer (trente candidats ont été assassinés et 10 enlevés pendant la campagne) ou menacer les électeurs.

No comments: