Sunday, December 23, 2007

Tanta yuca buena que se come en la provincia (Carlos Vives - El hambre del liceo)

Aujourd'hui c'est programme travaux des champs! Enfin plutôt inspection des travaux finis parce que bon, quand on est rat des villes on sert pas à grand chose au milieu des ouvriers agricoles à la peau tannée par le soleil ;-) Les parents de Calu et Nelvi sont les seuls de la famille à avoir encore des champs cultivés et à n'avoir pas transformé leur terrain en "finca" de villégiature. Et on est en plein dans l'époque de la récolte de la yuca.

La yuca n'est pas très connue en Europe, pourtant avec son cousin le manioc ils constituent la 3e source de glucides au monde. La yuca est bien sûr une racine, mais moins filandreuse et plus farineuse que le manioc, avec un goût plus doux. Elle pousse en arbustes d'environ 2m avec des petites feuilles et des branches de rien du tout... du moins à vue d'oeil! Et comme ici tout pousse, il n'y a pas moins de 4 récoltes par an, souvent alternées avec le maïs pour permettre à la terre de se reposer. La yuca est un élément essentiel de la gastronomie colombienne, et remplace presque la pomme de terre dans certaines régions. Elle est utilisée sous forme de farine, ou bouillie dans de délicieuses soupes, ou encore frite. Signe culturel qui ne trompe pas: au rayon des surgelés d'un supermarché colombien ou bien dans les fast food, on trouve autant de frites style Mc Cain que de "yuca a la francesa", tout aussi populaire!

Nous voilà donc chaussées de bottes en plastique à écouter les explications du cousin de Calu - casquette blanche - qui contrôle la récolte pour le compte du propriétaire (le père de Calu) et du contremaître -casquette marron - qui embauche et dirige les ouvriers. Le ciel paraît couvert mais qu'on ne s'y trompe pas: il fait chaud et le soleil tape très fort. Les ouvriers sont à l'oeuvre et se divisent à peu près le travail.



Première étape: couper l'arbuste à la machette et arracher les racines. Ouais, comme si c'était facile!!!! Les yucas sont plantées par deux, de façon à ce que les troncs des arbustes poussent enforme de Y et que les racines soient plus faciles à arracher (une branche dans chaque main et on tire). J'ai fait la tentative pour vous cher lecteur et je vous annonce que... le tronc n'a même pas frémi d'un millimètre alors que j'étais arquée à 90° en arrière en tirant de toutes les forces de mes petits bras de citadine. Les ouvriers, quant à eux, arrachent ça facile, comme si c'étaient même pas planté dans la terre jusqu'à près d'1m de profondeur! Le cousin de Calu nous le confirme: parmi tous les ouvriers agricoles, les ouvriers de la yuca sont les plus robustes, et aussi les plus rudes. Il ne faut pas les chercher, car apparemment ils ont mauvais caractère et sont réputés pour leur violence, entre eux ou au sein de leur famille... Gentil le monsieur, hein? On va vous les laisser alors, les arbustes...



Deuxième étape: virer les arbustes coupés et préparer les racines. Un coup de machette par ci, un coup de machette par là et hop: voilà la yuca telle qu'on la trouve en bout de chaîne. En effet, on achète toujours la yuca avec son écorce encore pleine de terre humide, et à la maison on leur enlève leur enveloppe d'1 bon mm d'épaisseur avant de les rincer et de les cuisiner (ou de les congeler).



Troisième étape: certains ouvrier plus qualifiés et rompus que les autres se chargent de les mettre en sacs. Car c'est une affaire compliquée. Il faut d'abord couper un bout de la racine pour voir l'intérieur. S'il y a un petit point jaune, pas de bol, la racine n'est pas au top de sa forme. Aucun danger pour la consommation, mais ce sont des racines qui sont infectées par un petit champignon et donc elles ne peuvent pas ête vendues au prix fort. Elles seront écoulées sur les marchés locaux à plus bas prix, ou une petite partie sera donnée aux ouvriers comme paiement en nature (pour ainsi éviter qu'ils en piquent en douce). Les racines d'un blanc immaculé sont de bonne qualité, mais encore faut-il qu'elles aient le bon calibre: ni trop grandes, ni trop petites, et aussi la bonne couleur: la peau pas trop orangée, et bien lisse. L'ouvrier remplit alors les sacs avec les yucas top modèles, jusqu'à un poids de 25kg. Autant le calibrage que le remplissage des sacs se font par pur soupesage à la main, et l'expérience et la concentration de l'ouvrier sont déterminantes à cette étape.





Quatrième étape: le représentant du propriétaire vérifie le poids des sacs avec chaque ouvrier, individuellement. C'est important, autant pour savoir exactement le poids qui est envoyé au grossiste que pour évaluer la qualité du travail de l'ouvrier expérimenté. Bien que toute l'étape 3 aient été faite à la main, 80% des sacs font exactement 25kg, pas un de plus, pas un de moins!



Cinquième étape: les ouvriers apportent les sacs à la jeep, el "jipao" comme on dit en Colombie. Ces petites jeep qui n'ont l'air de rien sont en fait des monstres de mécanique. Ils sont capables de démarrer dans un sentier plein de boue et chargés de la récolte de tout un champ. Dans la région on leur voue un véritable culte, en organisant des festivals et des démonstrations de démarrage sur les 2 roues arrière (ce qui est très fréquent en utilisation réelle, à cause du poids du chargement qui fait basculer le véhicule). Les ouvriers arrivent, portant chacun 2 ou 3 sacs, qui, je le rappelle, font 25kg chacun!!!



Et hop, la jeep est savamment chargée, des sacs dans un sens puis dans l'autre, sur les côtés et sur le toit pour équilibrer, et enfin on fait passer une corde pour saucissonner le tout et qu'aucun sac ne tombe en cours de route.



Et puis ça y est! Tout est chargé et la jeep démarre sans aucun problème, direction le grossiste à Manizales, et au bout de la chaîne les consommateurs que nous sommes!

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